Elle peut vous expliquer ce qu’est un arpège mais se trouve incapable de chantonner Happy Birthday. En 2007, Lonni Sue Johnson a dû combattre une terrible maladie, une encéphalite à laquelle elle a survécu. Toutefois, cette inflammation du tronc cérébral a eu de sérieuses conséquences: elle a détruit une partie de son cerveau et notamment son hippocampe. Des lésions qui ont causé au final la perte de tous les souvenirs d’une vie.
Aujourd’hui, la femme de 64 ans, pilote d’avion, musicienne et artiste, ne se souvient plus de rien, ou presque, comme on peut le lire sur le site de l’université Johns Hopkins, à Baltimore, où Johnson est suivie. En effet, une partie de sa mémoire est restée, à la grande surprise des scientifiques.
Intrigués par son cas, des neurologues suivent l’évolution de Lonni Sue Johnson depuis son accident. Lorsque l’hippocampe est atteint, la capacité des patients à se souvenir et à emmagasiner de nouvelles informations est fortement impactée. Sur ce point, la femme ne fait pas exception.
Depuis qu’elle travaille avec Barbara Landau et ses collègues de l’université de Johns Hopkins, elle ne les reconnaît pas. Elle ne se souvient pas de ses dix années de mariage, n’identifie plus ses peintres préférés. Mais les scientifiques ont été étonnés de découvrir qu’elle pouvait encore expliquer les techniques de l’aquarelle très précisément.
Elle pouvait même décrire comment faire décoller un avion sans même avoir repris des cours de pilotage qu’elle aurait de toute façon immédiatement oubliés. Des explications qui ne devraient pas être possibles si sa mémoire explicite était atteinte comme les chercheurs le croyaient précédemment.
Des neurologues stupéfaits
Depuis le début du suivi, l’équipe a publié différents articles. Le dernier en date, paru dans la revue Cognitive Neuropsychology, explique la complexité de la mémoire mise en avant par le cas spécial de Johnson. Après avoir prouvé les grosses pertes qu’elle a subies, les scientifiques montrent qu’il lui reste un type de mémoire bien particulier.Les chercheurs nomment cela les «connaissances déclaratives liées aux compétences». Le fait que ces connaissances soient toujours présentes suggère que ce type de mémoire pourrait bénéficier d’un traitement différent dans le cerveau.
Pour vérifier cette hypothèse, l’équipe a posé 80 questions à Lonni Johnson sur les domaines où elle excellait – l’art, la musique, le pilotage et la conduite. Étonnamment, ses réponses étaient du niveau d’expert en ce qui concerne l’art et la conduite et largement meilleures que celles des amateurs pour la musique et le pilotage.
Les résultats obtenus suggèrent que le cerveau et la mémoire seraient encore plus complexes qu’on ne le pensait jusqu’ici. L’hippocampe pourrait ne pas être aussi important qu’estimé dans le traitement d’un certain type de mémoire, mais les raisons ne sont pas encore connues.
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